Le jeu
Qu’est-ce que NOTHINGNESS ?
Nothingness est un jeu de rôle. Ici, vous ne trouverez ni définition du jeu de rôle, ni explications savantes, car Nothingness se veut un jeu de rôle avancé, c’est-à-dire fortement fléché pour des joueurs expérimentés. Aussi, rien qu’en lisant ces lignes, ô débutant égaré, tu viens de gagner un grand max de temps !
L’âge des quatre fléaux
Après plusieurs millénaires de guerres incessantes, les Dieux des temps anciens ont failli causer la mort du plan de Weröl. Le châtiment pour leur légèreté a été radical puisque tous ont péri de la main du Dieu Soledad, Maître des Equilibres, devenu fou. C’est ce que les peuples de Weröl ont appelé « le Grand Théolocauste ».
La fin des Dieux a plongé les peuples dans un désarroi immense et Weröl n’a dû son salut qu’au réveil du Dieu Architecte des plans, Ka. Celui-ci s’est reconstitué grâce à la fusion temporaire du Dieu Mulveya Pancreator, sa conscience, et de Soledad. La destruction du monde s’est alors brièvement arrêtée, permettant l’émergence d’un monde imparfait. Soledad en est mort, mais son âme tourmentée a survécu, entièrement tournée vers la destruction. Son nom est Theochrone.
L’humanité a été sauvée mais a été extrêmement choquée par les événements qui ont suivi ce qu’on a appelé ensuite la seconde Guerre des Pénitents et qui ont vu les tenants de l’apocalypse final propager la guerre et la destruction à la faveur du crépuscule des Dieux.
Mulveya a appelé à lui des nouveaux Dieux dits immanents, c’est-à-dire provenant d’autres plans d’existence et de mondes étrangers, et les a chargés de veiller sur les hommes. Puis il est parti affronter pour l’éternité Theochrone, son principe frère, l’âme maudite de Soledad. De ce combat final dépend l’avenir de la création, qui est sortie affaiblie et malade de la précédente confrontation.
Weröl, et plus particulièrement les continents de Terra Mater et de Terra Negra, est en effet couturée de cicatrices. De nombreuses cités ont disparu, brûlées par un siècle de conflit. La plus grande civilisation du monde d’avant (l’Aquilon) s’est effondrée, entraînant avec elle un recul des arts, des lettres et des sciences dans tout le Ponant.
La Seconde Création n’a pas empêché la reprise de luttes immédiates entre les nouveaux Dieux immanents. La propagation de quatre fléaux a marqué ce second âge du monde de Weröl :
- La Déesse de la Terre a été empoisonnée par la Déesse de la Mer. Depuis, les eaux des océans et des mers sont toxiques et la terre lentement se meurt. L’Aigue-sourgne, ce liquide chaotique qui pollue les océans, rend la vie sur la côte de plus en plus difficile ;
- Au cœur du continent, le Néant, énergie liée à Theochrone, a débuté son œuvre, rongeant progressivement le plan de Weröl. Déjà, l’Empire du Néant n’est plus qu’un vide interdimensionnel où flottent quelques cités magiques ;
- Partout ailleurs, plane le danger néantique lié au Theochrone. Car il faut compter avec le mystérieux Infex, cette maladie néantique qui ronge lentement ses victimes et terrifie tous ceux qui voient leurs proches basculer dans la folie.
- Enfin, certains Dieux de Weröl sont malades : leurs rivalités pluriséculaires ont attiré l’attention des Mantes, des parasites divins qui se nourrissent des dissensions religieuses et captent une partie des prières des peuples.
Un tel monde peut-il survivre ?
En attendant que Mulveya Pancreator et Theochrone Neanticor achèvent leur duel cosmique, et prononcent la troisième Création - ou l’ultime Destruction - une poignée d’aventuriers issus des peuples dégénérés et cyniques de Weröl rentreront peut-être dans la Légende.
Jouer sur Weröl
Alors que le cycle theochronique débute, la peur du cataclysme final est pour tous les peuples une réalité. Le Dieu Mulveya est parti affronter son « frère », le Theochrone, et, en cas d’échec de sa part, une « troisième apocalypse » aura lieu avec la destruction finale de Weröl.
Les nombreuses guerres divines ont créé un sentiment ambigu vis-à-vis des Dieux. On les craint et, en même temps, on les maudit d’avoir ainsi joué avec la vie de leurs serviteurs. Certains leur dédient avec ferveur leur vie, espérant ainsi échapper au châtiment final ; d’autres pensent que l’équilibre sera éternel et qu’il vaut mieux se préoccuper du salut de son âme que d’une hypothétique victoire de Theochrone.
Quoiqu’il en soit, les personnages de Nothingness ont tous vocation à rentrer dans la Légende, c’est-à-dire le plus souvent accomplir avec succès la volonté des Dieux. Certains opteront pour l’affrontement cosmique entre le Theochrone et Mulveya Pancreator, car en jeu se trouve l’avenir de tout. Pour d’autres, la lutte entre le Chaos et l’Harmonie au sein de la Création, ou du Bien et du Mal, sera une cause plus immédiatement utile.
Les héros de Nothingness s’apprêtent à errer dans un monde extrêmement sombre où la nudité crasse de l’homme et sa bêtise côtoient le miracle des Dieux : les races féeriques. Démographiquement saigné, culturellement décapité, religieusement terrifié, Weröl voit arriver le Cycle du Theochrone comme un âge d’obscurantisme et de combat sans pitié pour l’avenir de la Création.
Philosophie du jeu
Nothingness est un jeu médiéval fantastique qui s’est construit autour de quelques notions fortes sur ce que doit être le jeu de rôle et de quelques thématiques. Si, bien évidemment, ces thèmes – surtout lorsqu’il s’agit de maîtrise – sont optionnels, il était nécessaire de les faire figurer pour que l’on en comprenne les tenants et aboutissants :
- Le refus de la superpuissance du MJ. Nothingness est un monde où la puissance est plafonnée. Contrairement à d’autres jeux – dont le plus célèbre est ADD – il n’existe que 9 niveaux d’expérience (pour les P.J.) et il est toujours possible pour un personnage de bas niveau de vaincre un personnage de haut niveau.
- Un jeu pour les roleplayers et les grosbills. Les règles du jeu cherchent à équilibrer les plaisirs de chacun et à faire cohabiter les deux « espèces » de joueurs. Bien que limités en puissance, les personnages de Nothingness sont très diversifiés et les combats épiques et sanglants. Pour les roleplayers, on trouvera un système de traits de caractère à jouer qui conditionnent le jeu et même la progression des points d’expérience. Le joueur choisit le paramétrage sur lequel il va être jugé au départ et notamment la part de roleplay en son sein. Il s’agit cependant d’un choix et non d’une obligation.
- L’équilibre unité/diversité au sein des équipes. Contrairement à la majorité des autres jeux, Nothingness encourage chaque joueur à développer son individualité et à tester jusqu’à son maximum la cohésion de groupe. Le principe n’est pas une équipe de joueurs complémentaires s’entraidant spontanément mais plutôt un ensemble baroque de personnes, ayant chacune un but dans la vie ou des intérêts propres. Tout l’art sera d’apprendre à faire gagner le groupe mais à le tirer dans lesens de ses intérêts personnels. Le système d’attribution des points d’expérience reflète ceci.
- L’importance de la religion et de l’héroïsme. Ces deux thèmes sont centraux. D’une part, les Dieux sont omnipotents et omniprésents et tout être est un jouet en leurs mains. D’autre part, rentrer dans la Légende et faire l’Histoire est le but ultime de tout personnage. Toute l’Histoire du jeu a ainsi été « jouée » auparavant.
- L’équilibre Féérie/Dark-Fantasy. Weröl est un monde très noir, très décadent, au bord du gouffre. Il peut disparaître à tout instant. En ce sens, Nothingness est à mi-chemin entre un univers à la Tolkien et un monde du type Earthdawn. Le monde n’est pas glauque mais volontairement sombre et se veut réaliste sur la stupidité des hommes qui causent leur propre perte.
- Les règles s’adaptent à l’univers. Chaque fois que cela est possible, Nothingness relie étroitement les choix de background avec des règles précises. En pratique, cela signifie que le choix d’incarner tel ou tel type de mage, d’adorer tel ou tel Dieu, aura des répercussions bien au-delà du background, mais également sur les règles qui s’appliqueront (accroissant ainsi le dépaysement). De plus, la place du MJ est traduite dans le jeu car le MJ devient… un des dieux transcendants, en tant « qu’esprit ».
Quelques grands principes de maîtrise
Chacun est libre de les accepter ou non. Voici toutefois la manière dont a été mastérisé Nothingness. Ces principes de maîtrise, très proches de la philosophie d’un John Wick, sont une manière de mener un jeu et sont donnés à titre indicatif :
- La triche aux dés de la part du MJ est extrêmement rare, uniquement pour sauver un scénario et dans un but d’intérêt général (assurer le plaisir du joueur). Dans un combat, ne jamais tricher et se lier les mains en jetant les dés devant le joueur. C’est extrêmement utile pour faire « frissonner » le joueur...
- L’importance de la règle fait du MJ un joueur. A Nothingness, tout le système DécenS (système de règles au dé100) a été bâti pour « enserrer » l’activité du MJ. A lui de jouer contre ses joueurs, de prendre des risques pendant la partie en refusant la facilité de la triche. Les PNJs proposés sont bâtis comme des PJs : simplement, le MJ doit doser correctement (cf. point ci-après). Les règles sont censées s’appliquer au MJ comme aux PJs.
- Dans le choix des monstres, faire attention à bien doser. Vous pouvez vous appuyer sur l’IPP (Indice de Puissance Physique) mais rien ne remplacera l’expérience. Mon dosage préféré est de mettre un tout petit peu plus que ce qu’il faudrait mettre pour s’assurer de la survie du groupe. Le bon affrontement, c’est celui où les PJs se lamentent au début en disant qu’ils n’ont aucune chance... et où ils survivent, sur le fil du rasoir, grâce à un peu de chance et beaucoup d’inventivité !
- La mort du joueur ne doit jamais survenir suite à un événement auquel il est totalement étranger. Dans ce cas, toujours ménager une porte de sortie, même un jet aléatoire, afin de donner sa chance au joueur. Plus généralement, toute action a toujours sa réaction possible : toujours accorder un jet de résistance.
- Hors cas de mort au combat, la résolution par le Maître du Jeu d’une situation conduisant à la mort d’un personnage doit être explicitée et expliquée à haute voix. MJ et PJs réfléchissent ensemble sur les implications logiques et regardent ensemble les possibilités existantes pour « sauver » le personnage. Si c’est impossible, alors le MJ décrète sa mort. Il s’agit d’un principe important pour rendre acceptable la perte par le joueur de son personnage.
- Ne jamais aider un groupe qui ne tente pas de s’aider lui-même d’abord, afin d’éviter un risque d’aléa moral (« la cavalerie, c’est-à-dire le MJ, viendra me sauver »), particulièrement en cas de combat crucial ou d’énigme. A l’inverse, on constatera que « tirer un personnage » est très long à Nothingness : c’est fait exprès, pour que le joueur fasse « attention » à son personnage. Ne jamais oublier que le dureté du mastering fait partie intégrante du jeu, car les joueurs y retrouvent la brutalité du monde qu’ils explorent.
- En cas de mort d’un personnage, lui faire jouer par intérim pour la fin de la partie un prétiré mais ne pas retirer un personnage tout de suite. La perte d’un personnage peut être traumatique et il faut que le deuil se fasse. L’expérience prouve que les idées de nouveau personnage immédiatement après une perte sont rarement réfléchies.
- Corréler une partie des points d’expérience avec la compréhension individuelle du scénario. Eventuellement expliquer à un PJ qui en fait la demande pourquoi il reçoit moins de points. Etre capable de revenir sur sa décision initiale après avoir entendu les arguments contraires du PJ. Un autre système parfois mis en oeuvre consiste à faire voter le groupe sur le joueur « ayant le mieux incarné son personnage » et lui multiplier par deux ses points d’expérience - mais dans ce cas, l’annoncer avant et ne pas le faire de manière systématique.
- Donner la liberté totale dans l’orientation de la campagne (choix des thèmes du scénario d’après) mais restreindre cette liberté à des options apparentes au sein d’un scénario plutôt que l’inverse, qui conduit généralement à la cacophonie. Je suis un grand partisan des campagnes « flexibles » où l’on écrit chaque semaine le scénario de la prochaine fois, en consultant ses joueurs pour voir ce qu’ils veulent faire.
- Dans la constitution d’un groupe, ne jamais oublier ce principe Nothingnessien : pour que ce soit réaliste, les joueurs ne doivent pas avoir 100% d’intérêts convergents. Les groupes les plus forts sont ceux où tous les personnages ont d’excellentes relations de se détester (cf. les évangiles de 749) mais doivent coopérer OU les groupes où chacun a un intérêt général convergent mais des intérêts particuliers (à la marge) divergents.
- Enfin, MJ qui s’apprête à incarner des habitants de Weröl, n’oublie jamais : les PNJ intelligents et coopératifs sont très très peu nombreux. La grande majorité est bas de plafond, machiavélique, xénophobe ou hypocrite...
Historique
Préhistoire
Nothingness est né comme tous les jeux de rôle amateur : un peu au hasard, beaucoup par fol orgueil. Passionné par les livres dont vous êtes le héros, j'avais adapté le concept en mode artisanal : des cahiers dessinés (et non écrits) où je faisais jouer mes petits collègues de classe, expliquant les images au fil des choix des joueurs… Je pondais pendant 3-4 ans en tout des dizaines et des dizaines de livres dont vous êtes le héros amateur. L'histoire de Nothingness débuta en 1995 lorsqu'un camarade de classe - nommé Antoine - me proposa de jouer à Warhammer. MJ unique, PJ unique : l'expérience fut brève - deux parties - mais fulgurante. Je me mis en tête, sitôt mon hobbit voleur mort, de faire mon propre jeu de rôle.
L'inspiration de départ était clairement Warhammer. On y retrouve des constantes : la prédominance du dé100, l'existence de coups critiques, et le Néant, décalque à peine voilé au départ du Chaos (les Horlas étant une copie des Guerriers du Chaos). Puisque cela faisait cool d'avoir un nom anglais, j'en trouvais un dans un dictionnaire bilingue, un peu au hasard, après plusieurs essais : Nothingness, c'est-à-dire Néant (même si après je me suis rendu compte que ça voulait sans doute plutôt dire « Rien »).
La version 1 de Nothingness était un petit carnet noir mi-dessiné, mi-écrit. On pouvait y jouer les races traditionnelles (humain, nain, elfe…), mais également l'humanosaure, qui finit par la suite par devenir une créature du Bestiaire. Le système de jeu était basé sur des classes et à la fin, on trouvait un Bestiaire essentiellement tourné sur le Néant.
Mon premier joueur fut ce même Antoine et l’histoire retiendra qu’il s’agissait d’un 11 septembre et d’un moine de l’ombre (classe disparue depuis mais qui correspondrait aujourd’hui à moine polythéiste). Il ne fit qu’une partie mais j’eus le bonheur d’attirer dans mes filets un joueur régulier qui incarna le premier vrai PJ, Alexia la voleuse.
Antiquité
L'été 1996 fut occupé à creuser le sillon avec un autre joueur unique qui devait avoir une postérité inattendue, Christian. Animateurs en colonie de vacances, le petit livret Nothingness permettait de nous occuper lors des fins de soirée et des pauses méridiennes. En juillet 1997, le jeu connut cependant son premier phumble : la pluie s'abattit sur nous et le jeu fut complètement trempé. C'est ainsi que naquit Nothingness V2, sur un carnet vert deux fois plus gros que le précédent. J'en profitais pour affiner le jeu… une manie qui a tourné à l'obsession durant les 10 années qui ont suivi.
En 1997-98, l'informatique ayant fait une entrée remarquée dans mon environnement, je me mis en tête de taper le jeu pour en faire un véritable livre. C'est de cette époque - la version 3 de Nothingness - que surgirent mes premières inventions - les djinns et les lutins - et que je me mis à agglomérer tout ce qui tombait sous la main : monstres de jeux vidéo, suppléments de Casus Belli ou de Dragon Mag (les korrigans en sont une émanation directe), inspirations tirées de romans de Fantasy divers (citons les Aes Sedai de Jordan, les livres de Bordage, le cycle « Daughter of the Empire » de Feist, ou la trilogie des Joyaux de David Eddings) ou bien aides de jeu sur internet (le Miroir de la Licorne…).
C'est parce que je sais ce que je dois aux uns ou aux autres que j'ai décidé bien plus tard que Nothingness serait en libre-accès sur le web. Il faut savoir rendre au public ce qu'il m'a donné.
De cette époque datent aussi mes premières vraies tables de Jeu de rôle. Désormais à l'université, je pus concevoir des campagnes avec mes premiers personnages « étoffés » - comme par exemple le mage Tetanos de Gilles ou Cassandra l'Insoumise (Christian). En s'étoffant, le jeu gagna en profondeur car il fallut expliquer et mettre en cohérence les différentes pièces du puzzle. La carte du monde s'élargit au-delà de ce qui est actuellement le Haut-Ponant et les Dieux furent directement importés des panthéons grecs, romains et indiens. Il y avait des races bizarres, comme les lunarks, inspirés des créatures de Dark Crystal, et des drôles d'amalgames (avec un train parcourant les terres et un système de cartes d'identité autour du cou).
Le système de jeu fut profondément revu et affiné, avec un contre-exemple absolu : ADD.
En effet, dans ces années-là, j'intégrai une table où le dé20 régnait en maître et je souffris beaucoup de la toute-puissance de ces PNJ au TACHO énorme. Je décidais en réaction que Nothingness serait volontairement un jeu limité en niveaux de puissance, et m'enorgueillis du fait qu'un niveau 1 pouvait (presque) tuer un niveau 9. Ne riez pas : c'est arrivé une fois, lorsque Yorek Korguin, korrigan malade et affaibli prisonnier d'une cellule, parvint à se débarrasser d'un maître de guilde assassin venu l'éliminer…
Moyen-Âge
C’est en 2000 qu’avec la version 4 de Nothingness, toujours enrichie et revue, débuta ce qui allait devenir une tradition : la mini-Convention du jeu de rôle. Née d'un réveillon du millénaire particulièrement sympathique, l'idée de réunir une semaine un groupe de joueurs pour faire du jeu de rôle intensivement s'est révélée porteuse de souffle épique. Le premier cycle de campagne pluri-annuelle débuta cette année-là et couvrit les trois premières conventions (Sault en 2000, Marseille en 2001, Serre-Chevalier en 2002). Ce fut le récit de la Guerre du Portail et les premières légendes du monde (Grinch, Galina, Cassandra) se fixèrent à jamais. C'est aussi à cette époque que fut retenu l'objectif du jeu : entrer dans la Légende.
Alors que j'étudiais aux Etats-Unis et que mon activité rôlistique s'était réduite aux conventions, j'en profitai pour m'atteler à mon premier vrai univers original : Atlante. Même si je reconnais l'influence de Star Wars (les terribles Lecteurs sont évidemment inspirés de Dark Vador) et de Gérard Klein (le jeu de l'Orgamon m'est venu à l'esprit en lisant « le Gambit des étoiles »), Atlante est vraiment mon bébé, et sans doute ce qu'il y a de plus original dans l'univers de Nothingness.
A mon retour dans l'Hexagone, le système de règles connut une révolution copernicienne. J'avais pu jouer à Star Wars et découvert le système d'actions. Je me décidai à l'importer dans mon propre jeu, ce qui me valut de limiter le nombre d'attaques par round, de segmenter ces derniers en tour, et de lier la capacité d'action à la vitesse. La version 6 de Nothingness fixa de manière plus précise la liste des caractéristiques tertiaires mais eut sans doute pour impact négatif de rendre les personnages moins héroïques. C'est aussi à peu près à cette époque que le jeu connut son second phumble, un crash informatique ayant irrémédiablement détruit les données de l'atlas.
Alors que je voyageais beaucoup pendant les années 2001-2004, je créais des groupes partout où je passais : en Vendée, au Japon, à Strasbourg. Les conventions reprirent et, après une convention de transition (celle de 2003 à Saut) s'amorça un nouveau cycle de campagne, celui des 7 pierres de couleur.
Renaissance
Cette campagne fit émerger une deuxième génération de légendes : Apernyx Dorkanis (Jean-Pascal), Kiwen (Benjamin), Al-Khalim (Christian), Shimrod (Balthazar). Les conventions de Saint Apolline (2004), Trets (2005) et Entrecasteaux (2006) accompagnèrent l’édition 7, puis 8 du Jeu, et se terminèrent par un évènement de grande ampleur : Grand Théolocauste.
En 2005, je fêtai dignement le dixième anniversaire du jeu et proposai d’en changer le nom, trop scrogneugneu à mon goût. Un non unanime de mes joueurs me fit reculer et je me consolai en baptisant le plan « Weröl ». Sans doute si l’on m’avait laissé faire j’aurais parlé de « Chroniques de Weröl » mais bon…
Avec la 9ème édition, le nombre de pages devint tellement substantiel qu’il fallut découper obligatoirement le jeu en plusieurs livrets, et ne plus les réunir en un seul big fat book.
Le succès de la 7ème mini-convention du Jeu de rôle fut tel que l’idée d’une publication commença à poindre. Je pris une année sabbatique pour « professionnaliser » le Jeu et le débarrasser de ses scories de jeunesse. Ceci accompagna une refonte très lourde du monde avec des choix destinés à rendre plus original un univers jusque là très classique : apparition de Dieux « maison », transformation des eaux en Sourgne, cloisonnement des essences magiques, apparition d’Emji, choix des 4 Fléaux comme « angle d’attaque » du jeu.
Ladite année sabbatique fut aussi canalisée par un projet complètement fou : l’organisation d’un jeu de rôle Grandeur Nature avec l’association Pierre d’Âmes. Réalisé en juillet 2007, ce GN prit place à Nostradia et réunit 140 joueurs.
Une fois le travail de fond opéré, s’engagea la formalisation du produit.
Les temps modernes
La première étape étant de faire illustrer mon jeu - qui avait considérablement grossi et se composait de 8 livrets - je me mis en quête d'un dessinateur bénévole, puis constatant mon échec, d'un illustrateur pas cher. Je ne le trouvai qu'en 2007 mais le travail d'illustration prit au final 3 années, mobilisant un nombre sans cesse croissant de personnes. C'est ainsi que j'ai rencontré des gens formidablement doués, la plupart prêts à consentir à des tarifs très en dessous du marché pour me permettre d'éditer mon rêve.
A partir de cette époque, 7 années de présence sur Paris permirent l'établissement de groupes de jeu de rôle stable. En 2007 démarra la troisième grande saga - la Campagne Mandragale - qui épousa les 8ème, 9ème et 10ème mini-Conventions (respectivement à Sault, Fougeré et Sainte-Maxime). Le travail de mise en images ne ralentit pas l'innovation perpétuelle en matière de règles devenues très lourdes avec le temps.
Le passage de la 9ème à la 10ème édition fut l'occasion de rationnaliser le système de compétences à partir de caractéristiques elles-mêmes inter-reliées en cascade, puis de simplifier le système d'actions en introduisant la notion de durée et en faisant sauter certaines limitations anciennes qui ralentissaient la machine.
Fin 2009, fut actée l'embauche d'un webmestre pour réaliser un site web d'un genre nouveau. J'ai connu, au début de Nothingness, la floraison des petits sites webs d'amateurs et de passionnés proposant tel ou tel jeu. Le site web de Nothingness devait selon moi servir de plate-forme pour créer une communauté en ligne et surtout garantir ce qui a fait l'originalité de ce jeu : la possibilité pour les joueurs d'influer sur le monde et de le faire avancer.
2010 voit l'épilogue d'une saga débutée 15 ans plus tôt. Le travail de maquettage a débuté - Le travail de maquettage a débuté - ce n’est qu’à ce moment que nous nous sommes aperçus que Word n’était peut être pas très adapté pour servir de support à un jeu qui comptait alors 1500 pages sur 5 livres et nous avons basculé sur In Design, avec la possibilité de commander sur le site Lulu l’édition XI sortie avec le site web le 1/11/2011.
L’Epoque contemporaine
De 2011 à 2020, Nothingness continue à s’étoffer avec deux livrets suppléments (le Manuel de campagne et le Kit du débutant), une nouvelle édition - l’édition XII - accessible également sur Lulu, le site permettant de télécharger gratuitement l’édition XI.
Néanmoins, la technologie évoluant, le système en flash pensé en 2011 n’est pas adapté aux smartphones. De plus, Lulu n’accepte plus les mises à jour des éditions pour de sordides raisons de compatibilité ce qui empêche le jeu d’évoluer.
Décision est donc prise en 2020 de lancer la V2 du nouveau site web et aussi de travailler sur une édition XIII revue et corrigée. Le jeu ne fait plus 1500 pages mais 2000 pages et un nouveau supplément, le Vade Mecum, qui est un livre du Maitre, est planifié. Aujourd’hui, l’édition XIII est en cours de fignolage avec une possibilité d’impression sur Pumbo et je réfléchis à la meilleure manière de laisser les fans commander ces ouvrages. Nothingness, en 25 ans de vie, aura accueilli près de 250 joueurs, plusieurs milliers d’heures de jeu (disponibles dans les archives), 21 mini-conventions et 13 éditions.
A votre tour, entrez dans la Légende !